Gageure 1.0
cdrom, 1999

Gageure 1.0 est un simulateur d'existence. Il nous propose d'oublier, durant quelques instants, cette peur du vide que nous partageons tous. Nous allons provisoirement nous sentir exister, nous réaliser, devenir quelqu'un. La recette est simple : il suffit de croire au travail.

Cette métaphore prend la forme d'un cédérom. Pourquoi? Dilbert(1) donne la réponse dans une question : "Mais comment faisait-on pour avoir l'air de travailler avant l'invention de l'ordinateur?". Aujourd'hui deux salariés sur trois travaillent avec un ordinateur, qui est devenu l'outil de travail par excellence. En consultant Gageure 1.0, nous allons donc avoir l'air de travailler. Et nous allons jouer avec un employeur à la fois anonyme, imprévisible et inflexible : l'ordinateur.

Le visage cathodique de notre interlocuteur est sans aspérité. Couleurs élémentaires de la vidéo, quelques pixels en guise de typographie, nous sommes interpellés par des propos laconiques au centre d'écrans uniformes.

La machine s'adresse à nous. Elle nous promet un épanouissement professionnel et personnel. Cette promesse est une propagande. C'est celle du capitalisme contemporain : le discours managerial. Ce discours, garant de la centralité du travail, nous berce au moyen d'un jargon constitué d'euphémismes mobilisateurs, et nous invite à nous conformer à ses modèles de réussite.

La réussite annoncée ne viendra jamais. D'abord confrontés à un simulacre d'entretien d'embauche, ignorants de ce que nous réserve la machine, nous allons peu à peu découvrir le caractère labyrinthique de Gageure 1.0. Tantôt acteurs de jeux aussi aliénants que le travail et la consommation, tantôt ballottés par un tout-puissant insondable, nous constaterons la vanité de nos espoirs d'épanouissement.

Exploitant l'hypertexte, ce parcours fait d'association d'idées offre une lecture non linéaire, issue du vagabondage de la pensée.

1. Scott Adams, Le principe de Dibert, First éditions

 

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